Mgr Pascal Gollnisch engagé dans l’association L’Œuvre d’Orient, revient sur la situation actuelle des chrétiens en Mésopotamie syrienne, sur leur histoire et leur future reconstruction.
Le 11 juillet dernier, un nouvel attentat a lieu en Mésopotamie syrienne, dans la ville de Qamichli. Une voiture piégée explose à côté de l’église orthodoxe Sainte-Marie et fait onze blessés. L’attaque a depuis été revendiquée par l’organisation Etat islamique (EI). Elle témoigne des tensions linguistiques et religieuses entre populations kurdes et chrétiennes. Alors que le califat de Daech a été démantelé en mars dernier, de nombreux conflits internes persistent et entravent la reconstruction du pays après huit ans de guerre.
Mgr Gollnisch est vicaire général de l’ordinariat des catholiques orientaux en France et directeur général d’Œuvre d’Orient. L’association agit au Moyen-Orient pour améliorer les conditions de vie des Chrétiens d’Orient et fait connaître leur situation en France. Dans un entretien accordé à Radio Notre-Dame, il analyse la condition de la minorité chrétienne de Mésopotamie syrienne, dans un contexte de reconstruction et de tensions avec l’administration kurde.
L’attentat, un instrument de peur pour faire fuir sur fond de tension avec les Kurdes Alors que les Kurdes administrent la région de la Mésopotamie syrienne, l’attentat du 11 juillet dernier, perpétré par une cellule dormante de l’EI, n’a pas pu être empêché. Pour Mgr Gollnisch, il est essentiel que l’administration kurde, principale force armée de la région, soit plus rigoureuse dans le domaine sécuritaire : « Les attentats ponctuels ont pour effet de déstabiliser la population et provoquent une angoisse. Les chrétiens sont déjà une minorité vulnérable et sont d’autant plus enclins à partir s’ils voient que des attentats se répètent. C’est une manière de chasser la population par d’autres moyens que la bataille rangée. »
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La Mésopotamie syrienne, région du nord-est de la Syrie entre le Tigre et l’Euphrate, accueille une majorité arabophone, composée de musulmans et d’une minorité de chrétiens mais la région est actuellement administrée par les Forces Démocratiques Syriennes (FDS), groupe principalement kurde. Ce dernier cherche pourtant à faire de la région une zone kurdophone. Le conflit principal de la région est donc linguistique.
Cependant, les chrétiens sont perçus comme des cibles doubles par les Kurdes, de par leur religion. Selon Mgr Gollnisch, « il y a une nécessité que les autorités kurdes prennent les moyens nécessaires pour assurer la sécurité des chrétiens, bien qu’arabophones. Ils sont là depuis bien plus longtemps que les Kurdes et les chrétiens sont chez eux en Mésopotamie syrienne. Ils n’ont pas à être une population qui est tolérée. »
Mgr Gollnisch retrace la chronologie de l’arrivée des chrétiens et des Kurdes dans la région :
https://radionotredame.net/wp-content/uploads/2019/07/GOLLNISCH-Histoire.mp3 Compte tenu de cette histoire, Mgr Gollnisch se déclare opposé à la formation d’un Kurdistan syrien : « Je pense qu’il doit y avoir un statut de la Mésopotamie syrienne mais ce statut ne peut pas être un Kurdistan comme en Irak. Cela ne correspond pas à la réalité de la population, ni à son histoire. Ce doit être un statut d’autonomie qui permettent aux différentes minorités de coexister. »
Quelle place pour les chrétiens dans une Syrie en pleine reconstruction ? Bien que l’Etat islamique ait été démantelé en mars, la situation en Syrie reste explosive. Mgr Gollnisch distingue trois plans :
Les faits de guerre qui persistent, notamment dans la poche d’Idlib ;
La vision politique portée par le gouvernement de Bachar el-Assad pour le futur du pays ;
Et les reconstructions matérielles et économiques. La Syrie traverse une crise économique sans précédent. Son taux de croissance s’élève à -15% et l’inflation atteint les 25.8%.
Les premières victimes de cette situation sont les populations civiles. Ces dernières vivent dans une grande insécurité et pauvreté mais aussi une incertitude quant à leur avenir politique. La situation est également aggravée par les sanctions américaines et européennes sur la Syrie. « Ces sanctions posent un problème éthique de faire pression sur un gouvernement en faisant souffrir la population » pour Mgr Gollnisch.
Dans ce contexte, Mgr Gollnisch voit pourtant les chrétiens comme des acteurs essentiels de la reconstruction :
https://radionotredame.net/wp-content/uploads/2019/07/GOLLNISCH-Chrétiens-reconstruction.mp3 Mathilde Piqué
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